📖 Histoire Complète
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La ville dormait encore quand la première alarme retentit. Personne ne savait d’où elle venait, ni pourquoi les lampadaires s’éteignirent tous en même temps. Pourtant, dans ce silence soudain, chacun sentit la même chose : quelque chose avait déjà commencé, et plus rien ne serait jamais comme avant. Un silence dense couvrait la ville. Puis, un souffle étrange glissa entre les bâtiments, glacé et irréel. Les regards se croisèrent derrière les vitres closes : chacun savait que ce n’était pas une panne, mais le signal d’un basculement déjà en marche. Je sortais de mon lit et regardais par ma fenêtre. La rue semblait étrangement calme pour l’instant. Aucun éclairage de mon appartement ne fonctionnait. Je me déplaçais donc dans l’obscurité et cherchais une lampe torche. Lorsque je mis la main dessus, quelqu’un toqua bruyamment à ma porte. De frayeur je lâchais la lampe torche qui roula jusque sous la table. Un juron au bord des lèvres mon regard tenta de percer l'obscurité hésitant entre me mettre à quatre pattes pour retrouver ma source de lumière ou aller ouvrir. Seulement je n'attendais personne ce soir. Mon esprit s’emballa. Peut-être un voisin, pris lui aussi dans la panique ? Mais chaque fibre de mon corps hurlait de ne pas ouvrir. La poignée resta immobile, figée dans l’ombre. Pourtant je sentais, derrière la porte, une présence muette, patiente, presque carnassière, qui attendait mon geste. Je finis par chuchoter : « Qui est là ? ». Une voix basse répondit, lasse, comme usée depuis des siècles : « C’est Julien… ouvre. » Mon ancien collègue, disparu depuis trois ans, censé être mort d’un cancer fulgurant. Mon souffle se fit court. Julien était mort, je l’avais vu. Alors qui parlait ? Mes mains tremblaient, mes pensées s’emmêlaient. Était-ce la fatigue, la peur, un délire ? Pourtant, ce timbre, je l’aurais reconnu entre mille. Une part de moi brûlait d’ouvrir, l’autre criait de fuir. J’écrasai mon front contre la porte. L’odeur du bois humide, la respiration de l’autre côté. Tout était vrai, et pourtant tout était faux. Dans cette nuit suspendue, je compris que le monde basculait, non pas dehors, mais ici, dans le simple geste d’abaisser une poignée. Je ne voulais en aucun cas précipiter la réalisation de ma destinée. De toute façon, si cette visite était vraiment une fatalité, il finirait bien par se passer quelque chose si je n'ouvrais pas la porte. Je ramassai donc ma lampe-torche, récupérai mon livre de chevet et m'assis pour le lire. La lecture ne m’apporta rien, sinon l’impression désagréable que les mots se vidaient de sens à mesure que je les parcourais. Derrière la porte, le silence s’épaississait. J’avais la sensation d’une attente sans fin, d’une négociation muette où, fatalement, je finirais par céder. Quand les lettres commencèrent à se mélanger devant mes yeux je constatais avec effroi que je n'avais plus rien entendu venant du couloir depuis un bon moment. Le remord me prit soudainement aux tripes. Et si Julien était mort ? Une deuxième fois? Il fallait que j'en ai le coeur net, alors, d'un pas décidé, je me dirigeai vers la porte et l'ouvrit sans une once d'hésitation. - Julien ? soufflai-je, la gorge sèche.Un écho indistinct, presque un souffle, remonta l’escalier.- Tu m’as laissé seul…La voix n’était ni proche ni lointaine, comme suspendue dans un vide instable.Je restai figé, incapable de savoir si je parlais au mort, ou à moi-même. Je fis quelques pas dans le couloir ou la lumière brillait faiblement. L'électricité semblait être revenue. Seul. Le remord me frappa avec la force d'un coup de poing. Il avait raison. Je le savais malade et jamais je n'étais allé le voir. Jusqu'à ce qu'il soit trop tard. En plein demarrage culpabilitatif, ma colonne vertebrale se glace : mon cerveau connecte subitement deux neurones : la sirène avait retenti, ce n'etait sûrement pas pour prévenir du seul retour de Julien. Mes yeux se dirigent vers la fenêtre, et là... ...je découvre, figé par l’horreur, un ciel strié de silhouettes flottantes, comme des ombres translucides glissant entre les immeubles. Chacune semblait fixer ma fenêtre, et je compris que ce n’était plus la ville qui dormait… mais quelque chose d’autre qui veillait. Un chuintement s’abattit du ciel, grave et continu. Une fenêtre d'en face s'entrouvrit; une silhouette pâle, sans traits, s'y découpa. Mon téléphone vibra: un message — «Ne regarde pas». Trop tard : quelque chose frappa la vitre, sourd, implacable. Je restai là, le souffle court, et compris qu'il n'y avait plus d'urgence que d'accepter. L'indifférence eut l'air d'une vertu : je m'assis, posai la tête entre les mains et attendis que le monde, ou ce qui en tenait lieu, fasse son œuvre. Une fissure parcourut la vitre; une voix sans bouche chuchota mon nom. Tout ce que j'avais fui palpitait là, à portée. Je tendis la main. Le froid m'engloutit; dans un souffle, je compris que rien n'allait revenir comme avant. Soudain, tout devient noir. Je perdis connaissance. Quand je me réveillai, ma première sensation fut le froid, comme celui que l’on ressent en touchant une surface gelée. J’ouvris les yeux, mais ne vis rien, la lumière était trop faible. Un voile de brume m’entourait, mouvant comme un rêve. Comment avais-je quitté ma chambre ? Était-ce Julien qui m’avait attiré ? Mais pourquoi ? Mort depuis trois ans, il n’aurait pas dû m’appeler. Un frisson m’envahit : et si ce n’était pas lui… mais quelque chose d’autre, qui usait de sa voix ? Ce doute persistait quand je le distinguai au dessus de moi, me tendant la main que je refusais. Je me levai de moi même, fier et en colère contre lui, pour masquer ma terreur de contracter son virus de renaissance. Je reculai, le souffle court. Son bras resta tendu, tremblant d’une force étrangère. Ses yeux luisaient d’un éclat fiévreux, reflet d’une vie qui n’était plus la sienne. « Tu finiras comme moi », murmura-t-il. La brume se resserra, et je compris que refuser n’était qu’un sursis. Je pris sa main, froide comme une promesse brisée. Un rire long monta en moi, plus de larmes, seulement une lassitude indicible. Acceptant l'absurde, je laissai la brume m'engloutir, enfin soulagé d'arrêter de lutter. De l'autre côté ce n'était pas si différent pourtant. Je ne me sentais pas différent. Est ce qu'on se sentait mort? Ou alors c'était une chose inventée par les vivants qui avaient peur de la mort? Julien se tenait à côté de moi. Silencieux. Ce n'est pas lui qui me donnera des explications.
Histoire écrite collectivement par la communauté BookChain
Commencée le 27 août 2025
Dernière mise à jour le 20 septembre 2025